Une salle thématique en partie dédiée aux modèles d’artillerie ouvrira ses portes à l’automne 2014. Le chantier de récolement de ces objets à récemment permis de reconstituer un modèle de canon-revolver dont les roues et le bouclier avaient depuis longtemps été séparés de l’arme et de son affût. L’histoire et l’intérêt de ce modèle sont aussi intéressant qu’étonnant. En 1861, J.-A. de Brame, un français installé à New-York, met au point un canon-revolver, c’est-à-dire une bouche à feu équipée d’un barillet dans le but d’obtenir une cadence de tir plus élevée. A l’échelle de l’artillerie, c’est une arme nouvelle pour l’époque [1]. Elle se compose d’un berceau en bronze dans lequel est installé un barillet à six chambres, maintenu par un axe en acier. Au niveau de la chambre de tir (la plus basse), le berceau est prolongé par un canon ajouré constitué de six barres d’acier maintenues par quatre bagues. Dans les rapports d’essais américains, ce canon est souvent nommé « tube directeur ventilé ». La conception originale de cette pièce est la réponse de l’inventeur au besoin de refroidissement du canon. Cela permet de ventiler l’arme car l’échauffement est important avec un tir rapide. La rotation du barillet s’effectue à la main, après avoir libéré une goupille à ressort située sur la gauche du berceau. La culasse est munie d’une poignée manœuvrant un dispositif à vis qui, lors du tir, assure l’étanchéité entre l’arrière de la chambre de tir et le berceau. En revanche, les munitions employées par ce canon-revolver, des obus d’un calibre de 2 pouces (soit 5,08 cm) et le système de mise à feu sont inconnus, aucun élément n’étant parvenu jusqu’à nous. Ce canon-révolver possède une autre particularité : il est muni d’un bouclier en deux parties dépliables en tôle. Ce dernier est percé de deux orifices, l’un pour laisser passer le canon et l’autre pour permettre le pointage par la chambre supérieure du barillet. Là encore, de Brame innove car aucune pièce d’artillerie de campagne de l’époque n’est équipée d’un bouclier à cause du recul des pièces lors du tir, effet très réduit sur le canon-revolver, du fait de son petit calibre. Au mois de juillet 1861, J.-A. de Brame fait fabriquer un prototype de son arme, à taille réelle. Ce canon-revolver – aujourd’hui conservé au National Museum of the Marine Corps à Quantico (Virginie, USA) – est testé par l’armée américaine à la fin de l’année 1861. Malgré des expérimentations concluantes et des rapports d’essais convaincants aucune décision n’est prise en ce qui concerne l’adoption et la mise en production de l’arme, alors que la guerre de Sécession fait rage depuis 8 mois. En effet, le gouvernement unioniste des États- Unis imagine une guerre courte et estime qu’il n’y a pas besoin d’engager des crédits pour la production à grande échelle de nouvelles armes. Si le canon-révolver de Brame n’est pas officiellement mis en production, il faut tout de même mentionner qu’à la fin de l’année 1861, de Brame fait construire à ses frais deux canons-révolvers qu’il offre au 51e régiment d’infanterie, composé en grande majorité de volontaires new-yorkais. Par contre, aucun témoignage de l’utilisation de ces canons-révolvers ne nous est parvenu. Parallèlement, J.-A. de Brame fait également fabriquer une maquette qu’il envoie en France à l’attention de Napoléon III [2] en espérant attirer son attention et celles de ses collaborateurs. Malheureusement, après étude par le comité d’artillerie, son projet est jugé peu fiable et, en 1862, l’empereur fait don du modèle au musée d’Artillerie, ancêtre du musée de l’Armée.
Christophe Pommier, département Artillerie |
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