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Les arches de Jouy et celles d’Ars, maintenant classées « Monuments Historiques », appartenaient à un magnifique pont-aqueduc romain qui enjambait la Moselle. Cet aqueduc fut construit pour alimenter en eau la ville gallo-romaine de Metz (Divodurum) depuis les sources de Gorze. Un aqueduc se définit par son point d’arrivée : il s’agit donc de l’aqueduc antique de Metz, long de 22km dont 21 souterrain ! Les romains choisissaient des eaux de bonne qualité (limpidité, abondance, regularité, goût, bienfaits, ce qu’on en disait..) : les sources de Gorze, principalement la source des Bouillons mais aucun bâtiment de captage n’a été trouvé…Par contre, le tracé de l’aqueduc est connu.
S1 : aqueduc souterrain : 13 km, de la source des Bouillons à Gorze jusqu’au grand bassin d’Ars.
S2 : pont-aqueduc : 1,125 km, disparu dans la plaine alluviale, des vestiges subsistent sur les 2 versants : Rive gauche à Ars : 7 arches en 2 tronçons + une pile, Rive droite à Jouy : 16 arches.
S3 : aqueduc souterrain : 8,5 km, du bassin de Jouy jusque Metz.
B.A : Bassin Amont d’Ars - sur - Moselle.
B.J : Bassin Aval de Jouy - aux - Arches.
Repéré par les moines bénédictins au 18ème, il longe le versant en suivant les courbes de niveau avec une pente d’environ 1m/km, puis la vallée de la Gorzia jusque Novéant, contourne la colline, revient vers le nord, et ressort à Ars, traverse la vallée de la Moselle à cet endroit ( après elle s’élargit) par un pont de 1,125 km de long !!! (le Pont du Gard ne mesure que 200m !), puis repart en souterrain dans la colline derrière la tuilerie de Jouy, … on ne sait pas exactement où arrivait le conduit : la construction de la citadelle de Metz a dû entrainer la destruction du bassin de réception, … les eaux étaient distribuées aux fontaines de la ville, aux thermes (sous le musée de la cour d’or, sous l’îlot St Jacques…), aux réservoirs, et à quelques riches maisons. Sa construction date sans doute du 2ème siècle après J.C lorsque la ville se transforme, les maisons de terre et de bois du 1er siècle laissent la place à des constructions de pierre.
L’aqueduc souterrain (coupé par la route entre Gorze et Novéant ) est un conduit maçonné et vouté de 1,60m de haut sur 1,20 m de large, étanchéifié par un mortier rose (sable, chaux et brique pilée) sur le fond et remontant sur les parois de 0.90m.
Le bassin amont d’Ars sur Moselle, dégagé par les bénédictins au 18ème avait été réenfoui. Après la construction de l’A31 (1970), des fouilles de sauvetage sont entreprises pour le retrouver. Dégagé, il ne se situe pas exactement dans l’axe du pont, aurait perdu 1,60m d’altitude par rapport au sommet des arches, et des dislocations laissent penser qu’il a eu glissement de terrain (ancien). La conduite souterraine débouche dans un grand bâtiment cintré pour mieux résister à la pression de la terre. Un bassin rectangulaire de 4.20m x 3.30m et 1.30m de profondeur permet aux eaux tumultueuses de se « calmer », puis de déposer les matériaux transportés (sables, graviers...).
Briques et pierres triangulaires maçonnées, mortier rose assurent l’étanchéité. Des encoches visibles sur le conduit latéral témoignent de l’emplacement de vannes permettant l’évacuation d’un trop-plein, le nettoyage des limons de décantation
Les eaux ainsi calmées, nettoyées, régulées s’engagent dans le double conduit du pont –canal.Des peintures murales (mairie d’Ars) et des éléments sculptés ont été découverts au 18ème et en 1970.
Cette double canalisation sur le pont-aqueduc est un phénomène unique dans le monde romain. Elle présente plusieurs avantages : fermeture et mise à sec de l’un ou l’autre conduit : réparation, entretien sans coupure d’eau...la réduction du volume d’eau dans chaque conduit atténue le mouvement ondulatoire (effet de vagues), …le muret central et la double voûte (supposée) répartissent mieux le poids sur des piles plus larges, plus stables.La conduite se trouvait à plus de 30 m au-dessus de la rivière. Le pont- aqueduc a perdu son aqueduc, il faut imaginer une hauteur supplémentaire de 3m, environ. Mais quelle était la forme de l’ouvrage dans la traversée du lit de la Moselle ?
Le faible écartement entre les bases des piles des 110 arches aurait gêné la navigation, aucun indice n’a été trouvé…, ni sur les plus anciennes gravures (1610) qui indiquent les arches proches de l’état actuel…ni par les plongées trop sommaires dans la rivière …Peu après leur création en 1837, les « Monuments Historiques » entreprirent consolidations et restaurations successives,… certaines, même, durant l’annexion allemande : renfort de piliers en briques rouges .Depuis 1980, elles sont réalisées par étapes. Les piles sont constituées par caissons superposés de hauteur variable plus larges en bas séparés par des retraits en biseau. La bordure saillante en haut ou « imposte »sert à recevoir le gabarit en bois pour la construction de la voûte, il est mouluré par la suite pour un aspect plus décoratif. L’aspect ruiniforme laissé volontairement en haut pour bien indiquer qu’il manque la partie supérieure.Malgré leur construction imposante, massive, ces arches présentent une certaine élégance : « en regardant vers le haut, les vides l’emportent sur les pleins ».A l’autre extrémité du pont, la double conduite arrive dans un bassin plus petit : 4m de diamètre. Le bassin aval de Jouy est situé dans une rotonde, en son centre un bassin plus profond : 1.60 m sur 2 m de diamètre. A son arrivée, l’eau tournoyait avec force. Ralentie puis décantée, elle repartait en souterrain vers Metz par un coude à 90°.
Arrivée du double conduit au bassin de Jouy. Vue dessus du bassin. A Ars comme à Jouy, un petit canal captait une source du versant permettant un apport d’eau supplémentaire si besoin.L’aqueduc certainement construit au 2 ème siècle après J.C. a fonctionné pendant au moins 2 siècles, une pièce de monnaie datée du 4 ème siècle a été retrouvée dans la maçonnerie (de réparation ?)… Une inscription incomplète (conservée au Musée de la Cour d’Or) concerne 6 généreux notables donateurs qui auraient financé le portique et la fontaine qui marquaient de façon monumentale l’extrémité de l’aqueduc dans la partie sud-ouest de la ville. La durée d’utilisation et les causes de l’arrêt de son fonctionnement restent à l’état d’hypothèses…Metz a dû revenir à une alimentation en eau plus traditionnelle (puits, réservoirs, rivière…).L’aqueduc, prouesse technique et architecturale, a apporté davantage de confort, de raffinement dans la vie quotidienne et sociale des habitants et participé au prestige de la ville antique.
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