Dans l’Aviation Navale et l’US Navy, les hélicoptères chargés de surveiller les manœuvres d’appontages et de décollage du porte-avions, et le cas échéant de porter secours aux pilotes en difficultés sont appelés « Pedro« . Primordiale au bon déroulement de toute opération aéronavale, la mission « Pedro » a toujours nécessité des hélicoptères fiables, stables et bien pilotés. Assez étrangement dans les marines française et US, c’est avec le même appareil que cette mission naquit réellement : le Piasecki HUP Retriever.
Fin 1945,l’état major de l’US Navy annonça qu’elle recherchait un hélicoptère de sauvetage en mer et d’évacuation sanitaire apte à opérer depuis ses porte-avions, notamment par mauvais temps. Plusieurs hélicoptéristes proposèrent des machines, mais rapidement c’est le projet de Frank Piasecki qui se détacha du lot. Désigné PV14 dans la nomenclature du constructeur celui ci se présentait sous la forme d’un birotor en tandem propulsé par un unique moteur en étoile. Un prototype du PV14 fut commandé par la marine américaine sous la désignation de XHJP.
Le prototype du XHJP fut construit assez rapidement. Outre son architecture birotor, à trois pales à chaque fois, il disposait d’un fuselage en métal et d’un cockpit biplace côte à côte largement vitré. Un aileron double dérive de grande taille, installé à l’arrière de l’appareil, assurait sa stabilité en vol. En outre l’hélicoptère possédait un train d’atterrissage classique fixe. Sa propulsion était assurée par un moteur à sept cylindres en étoile Continental R-975-34 d’une puissance de 525 chevaux. Son premier vol eut lieu en mars 1948.
Durant la phase de définition de l’appareil, le cahier des charges changea. Désormais l’appareil devait également être apte aux missions de soutien logistique et de liaisons. La désignation des premières versions de séries allaient donc être HUP et non pas HJP. Le nom choisi était Retriever. Les premiers appareils de série arrivèrent en unité en février 1949.
Initialement commandé à 32 exemplaires, le HUP-1 ne fut livré qu’à 22 exemplaires. Cette diminution fut le résultat des travaux de Piasecki sur le PV18, une version améliorée dont le premier changement visible était l’abandon de la double dérive arrière, jugée inutile. Celui-ci fut immédiatement commandé à 165 exemplaires sous la désignation de HUP-2. Les premiers arrivèrent en unités en janvier 1950. Rapidement les Retriever se taillèrent une réputation d’hélicoptères stables, bien pensés, et surtout agréables à piloter. L’US Navy les utilisa pour assurer la protection de ses aéronefs autour du porte-avions.
Quelques HUP-2 furent transformés en HUP-2S destinés à la recherche des sous-marins ennemis. Dotés d’un sonar embarqué ces appareils devaient repérés les submersibles ennemis, plutôt du genre soviétique, et prévenir par radio les avions chargés de les détruire. Cependant l’avènement de nouveaux aéronefs, tel le Grumman S2F Tracker, condamna le HUP-2S, et la majorité d’entre eux ne servirent qu’occasionnellement. D’autant qu’ils n’emportaient ni charge de profondeur ni torpille.
L’année suivante, en 1951, c’est l’US Army qui s’intéressa au HUP-2, et en commanda 70 exemplaires sous la désignation de H-25 Army Mule. Cependant l’armée américaine déchanta rapidement, se rendant compte que l’appareil était totalement inadapté à ses besoins. De ce fait cinquante appareils furent rétrocédés à l’US Navy sous la désignation de HUP-3. Les vingt H-25A ne servirent dans l’US Army qu’entre 1953 et 1958, et ne furent jamais employés en opérations extérieures.
Au contraire les HUP-1 et HUP-2 participèrent activement aux opérations de la guerre de Corée, où ils sauvèrent plusieurs pilotes dont les avions rentraient bien souvent en piteux état, ou bien à court en carburant. Après le conflit, ils continuèrent ce rôle. Un sauvetage est resté célèbre, celui de Edgar H. Barry, pilote d’un Grumman AF-1 Guardian, qui sauta de son avion avant que celui-ci ne s’abîme en mer aux abords du porte-avions USS Block Island (CVE106). Le plongeur du Retriever du se battre avec le parachute plein d’eau de Barry pour le sauver et le hisser à bord de l’hélicoptère au moyen du treuil mécanique externe. Ce sauvetage fut massivement repris par la presse américaine.
En septembre 1962, lors du réalignement des systèmes de désignations les HUP-2 et HUP-3 encore en service furent respectivement désignés UH-25B et UH-25C. La majorité de ces hélicoptères demeurèrent en service jusqu’en 1964. Ils furent remplacés principalement par le Sikorsky HSS-1 Seabat.
Même s’il ne fut pas un grand succès à l’export l’appareil fut vendu à deux clients étrangers : la Royal Canadian Navy et l’Aéronautique Navale. Si le Canada n’acheta que trois machines, similaires au HUP-3, il en fut autrement de la France. En effet en 1953 elle acheta 19 HUP-2.
Ces hélicoptères servirent en premier lieu à remplacer des Sikorsky S-51 totalement inadaptés, et aussi à améliorer l’efficacité des voilures tournantes dans la Marine Nationale. Jamais utilisés en flottille, ils furent utilisés exclusivement par les Escadrilles 10S, 20S, 23S, et 58S. Cette dernière servait notamment à l’entraînement avancé des futurs équipages.
C’est sous les couleurs de la 23S que le HUP-2 vola principalement en France. Utilisés durant la guerre d’Algérie, aux côtés des HSS-1 de transport des commandos marines, les Retriever servaient comme hélicoptères d’évacuation sanitaire. Par la suite leur carrière fut intimement liée au porte-avions Clemenceau dont ils furent les premiers Pedro jusqu’à l’avènement des Alouette III. Finalement, la France retira du service ses derniers HUP-2 en juillet 1965.
Fondamentalement moins connu que le H-21, le HUP Retriever est l’autre « banane volante » de Frank Piasecki. Un hélicoptère bien plus marqué comme machine navale que son grand frère. Pour preuve les Retriever préservés dans le monde ne portent jamais les marques de l’US Army. L’un est exposé sous une livrée US Navy au National Air & Space Museum de Washington-DC tandis qu’un HUP-2 aux couleurs de l’Escadrille 23S est exposé dans le hall des voilures tournantes du Musée de l’Air et de l’Espace. Cet hélicoptère aura profondément marqué les marines américaines et françaises.