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La Première Guerre mondiale est le théâtre de nombreuses atrocités. L’utilisation des gaz toxiques en fait partie. Utilisé en premier par les Allemands, le gazage massif des troupes adverses est une technique aussi cruelle qu’efficace. Pourquoi les troupes se sont-elles servies de l’arme chimique ? Quels gaz ont été utilisés pendant la Première Guerre mondiale ? Quelles en sont les conséquences ? Le musée de la Grande Guerre de Meaux vous révèle tout sur cette guerre chimique.
Avant la Première Guerre mondiale
Avant la Première Guerre mondiale, plusieurs accords autour des armements ont été signés. Il s’agit, en effet, d’établir différents accords politiques ou juridiques pour limiter, réduire, réglementer ou interdire certaines catégories d’armes ou de méthodes de guerre. L’utilisation de gaz pendant la Première Guerre mondiale est donc en principe contrôlée.
En 1889, le tsar Nicolas II de Russie convoque 26 pays à participer à une conférence à La Haye. Elle a pour but de régir les lois et les coutumes de guerre. Elle a aussi pour vocation de mettre en place la cour d’arbitrage international de La Haye. C’est à cette occasion que l’utilisation des gaz a été interdite.
Les premières attaques au gaz lors de la Première Guerre mondiale
Le 22 avril 1915, l’armée allemande réalise sa première attaque massive au gaz à Ypres, en Belgique. Vers 17 heures, un nuage verdâtre de dichlore s’approche des tranchées dans lesquelles les soldats français de la 45e division d’infanterie et la 87e division d’infanterie territoriale sont stationnés. Près de 15 000 hommes ont été intoxiqués et plus d’un millier a perdu la vie. L’utilisation de gaz pendant la Première Guerre mondiale est une véritable tragédie, en plus d’être considérée comme “un acte commis par l’ennemi en violation du droit des gens”.
Les témoignages des Poilus victimes des gaz pendant la Première Guerre mondiale sont empreints d’horreur et de tristesse.
« Le nuage s’avançait vers nous, poussé par le vent. Presque aussitôt, nous avons été littéralement suffoqués (…) et nous avons ressenti les malaises suivants : picotements très violents à la gorge et aux yeux, battements aux tempes, gêne respiratoire et toux irrésistible ». « J’ai vu, à ce moment, plusieurs de nos hommes tomber, quelques-uns se relever, reprendre la marche, retomber, et, de chute en chute, arriver enfin à la seconde ligne, en arrière du canal, où nous nous sommes arrêtés. Là, les soldats se sont affalés et n’ont cessé de tousser et de vomir ». L’attaque d’Ypres a été supervisée par Fritz Haber. Cet éminent chimiste allemand est l’une des principales figures du développement des gaz de combat dans les tranchées. Ironie du sort, son travail sur la synthèse de l’ammoniac lui permettra d’obtenir le Prix Nobel de chimie de 1918.
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Quels gaz ont été utilisés pendant la Première Guerre mondiale ?
La Première Guerre mondiale est une guerre qui a vu le développement de nombreuses armes nouvelles. Les gaz n’y font pas exception et de nombreux produits ont été développés et utilisés spécifiquement pour le conflit.
En août 1914, les Français sont les premiers à utiliser le gaz lacrymogène dans des grenades. Les Allemands, quant à eux, lancent, en octobre 1914, des obus à fragmentation remplis d’agents irritants contre les troupes britanniques. En 1915, malgré les lois internationales, les Allemands utilisent à plusieurs reprises du dichlore. Il s’agit d’un gaz jaune-vert, 2,5 fois plus dense que l’air, avec une odeur suffocante et extrêmement toxique. Il réagit avec l’eau présente dans les muqueuses et les poumons pour former des acides qui détruisent les tissus. En 1916, l’armée française décide d’allier le phosgène au chlore pour attaquer ses ennemis. Difficilement détectable, du fait de son odeur très similaire à celle de la terre, ce mélange de gaz est une arme efficace pour asphyxier les troupes adverses. Surnommée “l’Étoile blanche”, cette combinaison est plus mortelle que le chlore. Le phosgène est responsable de 85 % des tués par arme chimique au cours de la Première Guerre mondiale. En juillet 1917, le gaz moutarde est utilisé par les Allemands avant la bataille de Passchendaele. Surnommé “gaz croix jaune” par les Allemands et “ypérite” par les Français, il est inventé par Fritz Haber. Cette arme a pour vocation d’infliger de graves brûlures chimiques aux yeux, à la peau et aux muqueuses, y compris à travers les vêtements et le caoutchouc des bottes et masques. L’impact des gaz n’est pas seulement physique, mais aussi psychologique. L’infirmière Vera Brittain, écrit au sujet de l’utilisation des gaz pendant la Première Guerre mondiale : « Je souhaite que les personnes qui parlent de continuer cette guerre quel qu’en soit le prix puissent voir les soldats souffrant du gaz moutarde. De larges cloques jaunâtres, des yeux fermés aux paupières collantes et collées ensemble, se battant pour chaque bouffée d’air, murmurant que leur gorge se fermait et qu’ils savaient qu’ils allaient étouffer. »
Quelles étaient les contraintes ?
Les gaz de combat lors de la Première Guerre mondiale ne peuvent être utilisés à n’importe quel moment. En cas de pluie, de fortes chaleurs ou de vents violents, la toxicité des gaz est réduite, sans oublier le risque non négligeable de voir le vent tourner et les gaz se retourner sur les tranchées des attaquants. Planifier une attaque au gaz demande donc de prendre de nombreux paramètres difficiles à anticiper. De plus, il ne s’agit pas de l’unique contrainte : la température du sol a également un rôle important dans l’utilisation des gaz. Si le sol est trop chaud, les nuées de gaz s’élèvent et leurs effets sont limités. Les conditions climatiques jouant sur l’utilisation d’une arme chimique rendent complexes les opérations.
La logistique est aussi à prendre en considération. L’utilisation de gaz lors de la Première Guerre mondiale nécessite une préparation en amont particulièrement compliquée. Il faut installer de nombreux cylindres de gaz (80 kilogrammes par cylindre) dans la première ligne de tranchées des troupes attaquantes. Ce processus peut être dangereux pour ceux qui manipulent les munitions. Par ailleurs, la manipulation de cylindres est lente et le camp d’en face a beaucoup de temps pour se rendre compte de la préparation de l’attaque et de prévoir des contre-mesures.
Les conséquences sur la Grande Guerre et d’autres conflits
L’utilisation de gaz pendant la Première Guerre mondiale a totalement changé les façons de faire la guerre. Cet affrontement a fait évoluer la perception des conflits et des stratégies militaires. Si, dès 1925, lors de la troisième convention de Genève, les nations signataires s’engagent à ne plus utiliser d’armes chimiques dans les futurs conflits : « l’usage militaire de gaz asphyxiants ou toxiques, ou tous les liquides, matériaux ou mécanismes similaires, ont été justement condamnés par le monde civilisé », de nombreux conflits verront à nouveau l’arme chimique utilisée, et certains gaz de la Grande Guerre referont surface.
De 1935 à 1936, l’Italie déroge au traité en utilisant des armes chimiques contre l’Éthiopie pour l’envahir. En 1941, le Japon utilise les gaz, notamment le gaz moutarde et le phosgène, contre la Chine. De 1983 à 1988, les attaques chimiques de l’Irak contre l’Iran se multiplient sur les combattants iraniens, mais aussi sur les non-combattants. Ont été utilisées des armes comme le gaz sarin, mais aussi le gaz moutarde, près de 70 ans après ses premières utilisations. Bien d’autres conflits auront vu l’utilisation des gaz, montrant une nouvelle fois à quel point la Première Guerre mondiale représente un tournant dans l’histoire de l’humanité.
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