4.4 Egypte Lagides Monnaies Florence MA
English Translation
Historique Voir ICI
History Click HERE
La politique fiscale lagide est connue par un corpus papyrologique qui témoigne, à partir de l’an 22 de Ptolémée II, de l’instauration de taxes avec des versements modestes mais réguliers, et payés par tous, en numéraire de bronze?Au Nord du pays, cette fiscalité est connue grâce à des registres qui font état du calcul de l’impôt par circonscriptions et catégories de personnes?
Ces registres rapportent des calculs comptables de l’administration fiscale et non des paiements réels effectués par le contribuable. Pour le Sud du pays, un important corpus d’ostraca thébains, en partie bilingues (grec et démotique), datant des règnes de Ptolémée II et III, est constitué de reçus fiscaux?Ces documents de la pratique indiquent un paiement effectif au Trésor des taxes royales par des particuliers. Certaines de ces taxes ne touchent que les Égyptiens et ne sont connues que pour la Thébaïde. Les reçus concernant ces taxes particulières attestent de sommes dont les fractions les plus petites correspondent à des quarts ou huitièmes d’obole
Le règne de Ptolémée II ouvre une nouvelle période dans l’histoire monétaire et fiscale de l’Égypte. Ses réformes fiscales en l’an 22 (264/263 av. J.-C. se caractérisent par des versements en monnaie de bronze et ce, notamment, avec la taxe sur le sel qui est une capitation universelle, la « gabelle » ptolémaïque
Alors que la monnaie en métal précieux, argent et or, a une valeur proche de la valeur commerciale du poids métallique qui la constitue, la monnaie de bronze est une monnaie fiduciaire. La valeur de ses pièces est déterminée par l’autorité émettrice, la Couronne lagide, et indiquée par leur diamètre ainsi que par leur type monétaire. La monnaie est un instrument du contrôle exercé par l’autorité royale et un symbole de celui-ci. Cela est particulièrement vrai pour la monnaie de bronze, dont l’usage est uniquement lié à la reconnaissance de l’autorité royale. Lors de la révolte de la Thébaïde (207-187 av. J.-C.), l’usage de ce numéraire est abandonné dans les territoires qui échappent au pouvoir alexandrin?
Les modalités de diffusion des monnaies en métaux précieux et de la monnaie de bronze diffèrent. L’usage de la monnaie d’or ou d’argent ne soulève aucune difficulté : pour les Égyptiens, habitués à évaluer en poids or et argent, l’apparition de ces numéraires ne constitue pas un brusque changement?
. La drachme athénienne, la « chouette athénienne », s’est imposée depuis le Ve siècle av. J.-C. dans l’ensemble de l’Égypte? De telles pièces se prêtent à la thésaurisation. Le contexte de diffusion de la monnaie de bronze est différent. Il s’agit avant tout d’une monnaie de paiement : la faible valeur des plus petites unités de ce numéraire permet de matérialiser des montants modestes comme, par exemple, ceux de la taxe sur le sel, pour lesquels le monnayage d’argent ne dispose pas de subdivision assez petite. En tant que telle, sa diffusion est nécessairement plus générale que celle des monnaies en métaux précieux. Ensuite, la valeur de la monnaie de bronze est artificiellement fixée par la Couronne et doit être acceptée par ceux qui l’utilisent. Pour les Égyptiens, cela représente un changement considérable car ils étaient habitués à évaluer la valeur des biens en poids de bronze, à côté des évaluations en poids d’or, d’argent et de cuivre. Désormais, ils doivent utiliser des pièces de bronze, objets qui peuvent rappeler les anciens poids mais dont la valeur comptable (faciale ou nominale) est très surestimée par rapport à leur valeur métallique réelle.
Tout comme en Grèce, où la monnaie de bronze est connue plus précocement, la mise en place et la diffusion de ce monnayage témoignent de la monétisation de la société, c’est-à-dire de l’usage de la monnaie non plus essentiellement dans une optique de thésaurisation mais comme un instrument de paiement. En Grèce, cette monétisation est considérée comme le résultat d’un processus qui court sur le temps long depuis les premières apparitions de la monnaie au VIe siècle, processus qui a été accéléré par les nécessités financières rencontrées par les cités grecques au cours de la guerre du Péloponnèse (431-404 av. J.-C.)
. En Égypte, la situation est différente : la monnaie n’est pas un phénomène endogène au pays mais exogène. Au début de l’époque macédonienne, elle fait l’objet d’un usage restreint. L’estimation de biens précieux en statères d’argent n’implique pas forcément, par exemple, un usage réel de pièces de monnaie?
. Or, avec les réformes fiscales de Ptolémée II, le monnayage de bronze doit être utilisé par l’ensemble de la population. Une question se pose : par quel vecteur la monnaie de bronze a-t-elle pu se diffuser dans l’ensemble du pays ? Cette diffusion n’indique pas que l’économie de l’Égypte se monétise brusquement. Une grande partie des prélèvements fiscaux restent ainsi en nature. Par monétisation, nous voulons signifier que, désormais, toute la population, ou du moins l’ensemble des contribuables, a dû utiliser la monnaie même si son usage est restreint et peut éventuellement se limiter aux seuls paiements des taxes royales.